lundi 12 septembre 2011

Diplôme/diploma

Tel que publié dans l'édition du 2 septembre  2011 du Courrier de la Nouvelle-Écosse

Au début d’une nouvelle année scolaire, je ne peux m’empêcher de réfléchir à ce qui se passe dans ces piliers de nos communautés, nos écoles.

Nous sommes tellement fiers d’offrir une éducation bilingue à nos enfants. On leur enseigne non seulement le français, mais aussi l’anglais à un niveau de langue première. On se vante que nos élèves se classent au premier rang dans les évaluations provinciales d’anglais. On vend le bilinguisme comme une (si pas la) raison d’inscrire nos enfants aux écoles francophones. On parle de nos gradués comme des jeunes tenant en main un diplôme qu’on qualifie de bilingue.

Mais j’ai dépoussiéré mon diplôme et il ne comporte aucun paragraphe, aucune phrase, même aucun astérisque lié à du texte tout petit qui dit que je suis capable de parler les deux langues officielles de mon pays. Avant de me rappeler que l’année inscrite sur mon diplôme affecte la pertinence de son utilité comme outil de recherche sur cette question, je vous assure que je me suis informée auprès de des gradués plus récents, et que le mot bilingue n’apparait pas plus sur les leurs. Alors pourquoi vent-on ce diplôme qui supposément nous certifie comme étant des citoyens parfaitement bilingues? Et est-ce que ce but ultime de bilinguisme ne vole pas le trône sur lequel devrait siéger nos compétences en français d’abord?

Soyons clairs : Je veux que nos jeunes puissent utiliser les deux langues officielles à leur plein potentiel. Je veux qu’ils maitrisent la langue de Shakespeare comme celle de Molière. Je suis fière qu’ils sont capables de faire de belles phrases en anglais qu’ils sortent n’importe où. Mais en les écoutant parler, il est clair que dans leur balance bilingue, ça penche énormément plus du côté de Shakespeare.

Je ne sais pas comment ils se comparent aux étudiants en immersion au niveau du français, parce que cette évaluation n’existe pas, mais je vous avoue que je ne serais pas surprise de les voir ne pas être classés en première place. Ce que je sais pour sur, c’est que beaucoup de nos étudiants bilingues sont très surpris de se voir placer dans des cours de français beaucoup plus basiques qu’attendu lorsqu’ils arrivent au niveau universitaire. Il y a un temps où certains se sont même retrouvés en immersion française après avoir gradué d’une école francophone. Bien que cela ne se produise plus, la réflexion se pose sur si c’est dû à l’amélioration de la qualité de la langue ou si c’était juste trop humiliant pour eux…

Donc je propose qu’on se rappelle que nos élèves sont exposés à énormément d’anglais dans leur vies, et qu’ils parlent en général un anglais près d’impeccable (ou du moins qui parait impeccable en comparaison avec leur français, tristement). Mettons-nous dans l’esprit que l’anglais est un effet secondaire de l’éducation en français, et soyons fiers de nos diplômes français, de nos résultats en français, de nos capacités de création littéraire. Soyons heureux que nous pouvons jouer avec la langue pour exprimer ce que l’on veut, et ce, en utilisant les subtilités, les nuances, et les mots qui font de la nôtre une langue reconnue mondialement comme étant belle et poétique. Et assumons que les gens savent qu’on parle bien en anglais, puisqu’ils nous entendent le faire plus que souvent.

Et n’oublions pas cette expression : « Le français s’apprend. L’anglais s’attrape. »

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